La rivière brûle
L’un des épisodes majeurs de la guerre qui a conduit à la défaite de la Nouvelle-France s’est joué au cours d’une nuit d’octobre en 1759, sur les berges de la rivière Saint-François. C’est ce qu’indiquent certains écrits de l’époque. Selon les carnets de guerre du major anglais Robert Rogers, deux mois auparavant, à la fin du mois d’août, des guerriers abénakis avaient capturé, non loin du village, un capitaine et un lieutenant anglais ainsi que des Amérindiens de la tribu des Loups. Les deux officiers étaient déguisés en autochtones. Les Abénakis les soupçonnent alors de passer des informations entre les généraux anglais Amherst et Wolfe. Ils les livrent au gouverneur de Trois-Rivières. Le général français Montcalm écrit aussitôt à Amherst et propose un échange de prisonniers. Amherst est exaspéré par la prise de ces officiers, qui s’ajoute aux nombreux raids effectués en Nouvelle-Angleterre par les Abénakis. Il donne donc l’ordre au major Rogers de prendre un détachement de 200 hommes et d’attaquer l’établissement abénakis de la rivière Saint-François.
Le 3 octobre, Rogers et ses hommes atteignent la rivière Saint-François puis le village fortifié des Abénakis. Ils s’approchent et voient qu’une fête est en cours. Seuls quelques guerriers assurent la surveillance du fort. Alors au milieu de la nuit, ils attaquent. Les Abénakis, surpris, n’ont pas le temps de prendre les armes pour se défendre. Les Anglais massacrent les habitants du village et pillent le lieu de culte et les greniers. Puis ils incendient tout, le village, la maison des jésuites et l’église de la mission. Selon le journal rédigé par Rogers, au moins 200 Abénakis perdent la vie. Les instances françaises, elles, font mention d’une trentaine de morts…